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29 mai 2024 3 29 /05 /mai /2024 21:04
13 novembre : il faisait un temps si doux à Paris...

Comme dans une tragédie antique, les voix s'élèvent peu à peu. Elles racontent le début d'une journée ordinaire, l'impatience de se retrouver le soir pour un anniversaire, simplement se voir, boire un verre, profiter de cet automne si doux, se disputer, rentrer dormir après une nuit de garde.

Mais déjà le Hasard se profile, celui qui dit "Toi, oui... Toi, pas...", qui décide de qui vivra et qui mourra, le Hasard ou l'horreur imminente, une personnification de la tragédie à venir, de ces heures que plus de huit ans après, personne n'a vraiment oublié.

Laurent Gaudé nous plonge avec ce roman hypnotique dans les différentes phases de la soirée, des terrasses des cafés au Bataclan, de la surprise à la terreur, de la joie de vivre au sang qui inonde les lieux, de l'effroi et de la douleur à une forme de transcendance..

Chacun prend la parole, les victimes, les passants, les policiers, les infirmiers et les médecins, les parents, les amis, ceux qui nettoient ensuite les lieux, côtoyant les fantômes ... Tout le monde sauf les tueurs car ce petit livre, même s'il nous ramène à l'horreur, est une ode à la vie, à la liberté, à l'amour...

"Nous avons appris qu'on pouvait mourir de marcher dans la rue, de s'attarder autour d'un verre avec des amis. Et pourtant, il faut continuer. Vivre. Comme on s'aime. Au nom de ceux qui sont tombés. Nous serons tristes, longtemps, mais pas terrifiés. Pas terrassés."

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6 janvier 2024 6 06 /01 /janvier /2024 18:54

Thomas d'Ausembourg, ancien avocat désormais psychothérapeute, et David van Reyborg, historien, dramaturge et écrivain, ont choisi, au lendemain des attentats de 2015 de publier ensemble un bref essai, dont le propos reste d'actualité.

Le message délivré est d'une grande simplicité. Il part de l'hypothèse que si chacun savait exprimer ses émotions, se comprendre soi-même et accepter la discussion, les relations seraient non pas moins conflictuelles, mais moins violentes, les conflits étant inhérents à l'humain mais pouvant être réglés de façon pacifique.

Des méthodes existent pour parvenir à ce résultat, dont la pleine conscience et la communication non violente. Dès lors, les auteurs préconisent notamment de les enseigner dès la maternelle, en s'appuyant sur quelques expériences concluantes menées en Belgique..

A l'heure où le débat, certes récurrent, revient sur les programmes scolaires, sur la nécessité d'accroître, outre les mathématiques, l'apprentissage des "soft skills" ou plus simplement des règles de vie en société, ce petit livre mérite d'être lu ou relu.

Comme le soulignent les auteurs, cet apprentissage devrait irriguer toute la société. Et c'est une excellente façon d'interroger nos rapports aux autres, d'apporter un peu d'optimisme face à la violence, sans imaginer qu'il s'agit d'une solution unique et susceptible de résoudre tous les problèmes.

Mais quels efforts seriez-vous prêts à réaliser pour tenter d'améliorer votre environnement proche? Celui d'apprendre et d'interroger vos pratiques?

 

 

Et s'il était possible d'apprendre la paix?
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14 novembre 2023 2 14 /11 /novembre /2023 18:53
Une enfance volée

1927 : Joseph a bientôt 8 ans et vit avec sa mère et sa grand-mère. le père, ancienne gueule cassée, est mort peu après la guerre. Le petit homme de la maison est choyé, notamment par une mère pleine de vie. La grand-mère perd un peu la tête, mais la vie est douce.

Quand la mère décède, tout change : la grand-mère est placée à l'hospice, Joseph à l'Assistance publique.

La descente aux enfers commence entre famille d'accueil, prison et colonie pénitentiaire. Joseph passe de l'un à l'autre sans trop savoir pourquoi. mais partout, c'est la même cruauté qui s'abat sur les enfants perdus, des enfants mal nourris, battus, violés, obligés de travailler comme des bêtes de somme,..

On retrouve dans le gosse la force narrative de Bakhita, une puissance qui vient à bout de tous les obstacles, une force de caractère hors norme, un espoir, ici porté par la musique, celle qu'apprend Joseph à la colonie et qui lui permet d'en sortir, de retrouver Paris et un semblant de normalité, si la normalité est possible après tant d'épreuves.

Une histoire bouleversante.

 

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19 août 2023 6 19 /08 /août /2023 14:59

Septembre 1997 au Cameroun : Chantal donne naissance à une petite fille Agnès. Elle ne voit que sa fille, alors que son entourage ne voit que le fait que l'enfant est albinos, ce qui est considéré comme une malédiction.

Tous l'abandonnent : ses parents, son petit ami... Et partout elle doit faire face aux préjugés et à l'ignorance. Mais Chantal est bien déterminée à protéger sa fille.

"Je n'ai pas su que tu étais albinos : ce sont mes parents qui me l'ont fait comprendre, avant de nous abandonner..."

Trois parties rythment l'album, dont le scénario est écrit par Christophe Ngalle Edimo, trois étapes de vie illustrées chacune par un dessinateur différent : Martini Ngola pour les premières années d'Agnès, Joseph Danny Nyembi pour son adolescence et Nathanael Ejob quand Agnès choisit d'aider les Albinos de son pays.

Les styles de dessins sont très différents et le message délivré est à la fois très simple et très fort. Les questions soulevées ne sont malheureusement pas limitées au Cameroun, comme en témoigne le combat mené par Al-Shymaa Kway Geer en Tanzanie (https://admin.over-blog.com/994753/write/84045788).

C'est également une belle occasion de découvrir un scénariste et des dessinateurs talentueux, tous africains, dont je n'avais jamais entendu parler.

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5 août 2023 6 05 /08 /août /2023 16:33
Un autre regard sur les quinqua.

A quel âge sommes-nous vieux? Tout dépend du contexte (en entreprise, bien plus tôt qu'ailleurs) et du genre.

Charlotte Montpezat souligne, en effet, que le vieillissement est, non seulement un phénomène biologique, mais aussi une construction sociale, des stéréotypes profondément ancrés dans nos mentalités. C'est ainsi qu'à 50 ans, un homme est perçu comme séduisant, dans la fleur de l'âge, conquérant.

Au même âge, les femmes disparaissent des radars. Elles n'apparaissent sur les écrans que pour lorsqu'elles ne font pas leur âge ou pour vanter les produits limitant les effets de la ménopause... Leur progression professionnelle? Inutile même d'y penser... Quant à leur capacité de séduction et leur vie sexuelle... Exit!

Cette vision peut apparaître caricaturale, mais il est indéniable que l'âge change les regards.

Pourtant, pour les femmes comme pour les hommes, 50 ans riment souvent avec une expérience professionnelle déjà riche mais qui ne demande à s'épanouir et à profiter à tous, de nombreux projets tant professionnels que personnels, des enfants déjà grands et donc plus de disponibilité, souvent un niveau de vie bien supérieur à celui de nos 20 ou 30 ans, et bien sûr de l'énergie et du désir.

Dès lors, Charlotte nous invite à changer notre regard sur les femmes de 50 ans et plus, les flamboyantes, à vivre cet âge avec délice, à mettre aussi en lumière aussi des femmes inspirantes à l'exemple de Salma Hayek, Amandine Aubert ou Oprah Winter.

Un beau message.

 

 

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14 juillet 2023 5 14 /07 /juillet /2023 14:34
La route de tous les espoirs

Dans un pays tout juste sorti d'une guerre civile, deux hommes ont pour mission de construire une route entre le sud vaincu et le nord où un nouveau dictateur a pris le pouvoir.

Ces hommes, qui travaillent pour une multinationale, ont des consignes strictes pour ne pas se mêler à la population et réaliser cette route dans un délai précis, avant une parade qui doit l'emprunter.

L'un sert d'éclaireur et veille à ce qu'aucun obstacle ne vienne ralentir le rythme de la machine qui le suit, l'autre se charge de l'asphalte. Mais si le second respecte scrupuleusement les consignes, désireux de finir dans les temps la mission, ce qui lui permettra de prétendre à une prime, le premier est son exact opposé, et les ennuis ne tardent pas à arriver.

Dave Eggers dresse dans ce roman, dont le titre exact est "la parade", un portrait cru de ces entreprises qui sont spécialisées dans la reconstruction de pays exsangues, de ces hommes qui viennent réaliser une mission dans un pays lointain, soit très concentrés sur leur travail soit, au contraire, très attachés à côtoyer la population locale et à profiter d'une certaine forme de gratitude pour apporter à nouveau la civilisation.

Un portait réaliste ou cynique selon la lecture de chacun, où même la fin semblait déjà prévisible dans les premières pages. Car si la route finit par être bien réelle, tout le reste n'est sans doute que mirage.

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3 juin 2023 6 03 /06 /juin /2023 21:01
Charlotte Perriand : une petite touche de Japon

En quelques touches légères et élégantes, Charles Berberian présente dans cette bande dessinée le parcours de l'architecte Charlotte Perriand, ou plus exactement son séjour au Japon entre 1940 et 1942.

C'est la rencontre d'une culture et d'une perception du monde, de l'espace, des objets du quotidien, une révélation peut-être qui inspirera longtemps les réalisations de cette architecte.

Charlotte Perriand : une petite touche de Japon

La présentation choisie par Charles Berberian est original, tant dans le format, l'occupation de l'espace et les couleurs. de nombreuses planches sont en noir et blanc (avec une touche de beige), une seule image pouvant occuper l'espace, et soudain, les couleurs apparaissent, comme un marqueur de l'histoire. C'est notamment le cas quand Charlotte découvre le Japon traditionnel. ce sont les pages les plus colorées de l'album. parfois, seul le bleu s'impose, pour marquer sans doute un trait de caractère : l'entêtement à la montagne, la puissance créatrice pour préparer une exposition.

 

Charlotte Perriand : une petite touche de Japon
Charlotte Perriand : une petite touche de Japon
Charlotte Perriand : une petite touche de Japon
Charlotte Perriand : une petite touche de Japon
Charlotte Perriand : une petite touche de Japon
Charlotte Perriand : une petite touche de Japon
Charlotte Perriand : une petite touche de Japon

L'album comprend aussi des croquis de quelques réalisations de Charlotte Perriand. Il se termine par une interview de sa fille Perrine, qui complète le tableau de cette grande dame de l'architecture.

C'est un bel hommage, dans son contenu comme dans sa forme.

 

Charlotte Perriand : une petite touche de Japon
Charlotte Perriand : une petite touche de Japon
Charlotte Perriand : une petite touche de Japon
Charlotte Perriand : une petite touche de Japon
Charlotte Perriand : une petite touche de Japon
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8 avril 2023 6 08 /04 /avril /2023 20:36
When you'smiling : la très belle histoire de deux êtres à part

Conçu et réalisé par Nadine Van der Straeten, "When you'smiling", qui fait référence à la chanson interprétée par Billie Holiday en 1938, évoque l'univers du jazz, des cabarets... C'est dans ce milieu que Rose a évolué, acceptant bien des compromis entre deux chansons, simplement pour survivre.

Elle est vieille maintenant, bien seule dans un petit pavillon de la banlieue parisienne, bien amère, jusqu'à ce qu'elle rencontre Mamita, et surtout son petit-fils, Léon.

Léon n'aime pas l'école, pas le foot. Sa famille le juge simplet et le rejette. Son refuge est la nature et sa chère Mamita, qui néanmoins disparaît bientôt.

Ne restent plus que Rose et Léon, et une histoire qui se tisse peu à peu, avec beaucoup de pudeur, de finesse et d'amour.

L'histoire est bien construite, racontant avec bienveillance l'histoire de deux personnes à part, le présent apaisant les blessures du passé. Il y a de la lumière dans cette histoire magnifique.

L'autrice a également réalisé "Jeanne Hébuterne", qui met en lumière la compagne de Modigliani et que je suis impatiente de lire tant "When you'smiling" a été une très belle découverte.

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24 février 2023 5 24 /02 /février /2023 16:50
Des mots d'Ukraine

Le 24 février 2022, la Russie lançait une offensive sur l'Ukraine, une attaque qui a jeté 15 millions de personnes sur les routes.

Dès les premiers jours, des écrivains ukrainiens ont été sollicités. 14 ont répondu, en exil, en Ukraine, voire depuis le front.

Quelques mois plus tard, ce recueil de textes était publié.

Il s'agissait à l'origine de décrire un lieu, pour que malgré la guerre, malgré l'habitude russe de renommer les lieux conquis, la géographie et l'identité ukrainiennes demeurent.

Les textes sont nostalgiques ou un brin ironiques, évoquant la maison perdue, le décalage parfois entre ceux qui sont restés et ceux qui sont partis, très souvent la nature, des lieux naguère un peu perdus, aux confins de l'Ukraine, désormais très peuplés car offrant une proximité avec une frontière : partir sans vraiment quitter son pays, sauf en cas de nécessité.

Il y a la guerre aussi, et cet émoi provoqué chez les soldats par la présence d'une femme. Il y a l'Ukraine, cosmopolite, à la fois si semblable et si différente d'un texte à l'autre, les souvenirs, les animaux perdus.

Un bel hommage à un pays si cher à chacun des écrivains.

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6 février 2023 1 06 /02 /février /2023 10:12
Portrait au vitriol de la France au début des années 1950

Le silence et la colère est le dernier opus de Pierre Lemaître. On y retrouve les personnages du Grand Monde (la famille Pelletier), auxquels s'ajoutent quelques portraits bien sentis, dont l'ingénieur Destouches, le gérant Guénot, l'inspecteur Palmiari et le docteur Marelle.

Ces derniers portraits rythment les trois sujets majeurs que Pierre Lemaître a retenu pour évoquer l'année 1952.

Louis et Angèle vivent toujours à Beyrouth, théâtre de quelques histoires autour de la boxe. Mais l'essentiel se joue en France métropolitaine.

L'après-guerre est, en effet, le temps des grands projets, des ingénieurs, des grands barrages et des villages engloutis.

C'est aussi l'époque où apparaissent les magasins style Tati, ou plutôt Dixie dans le roman, qui proposent des articles à petits prix, où les clientes peuvent elles-même fouiller dans les bacs pour y trouver leur bonheur.

Mais c'est également l'époque où la chasse aux faiseuses d'ange et médecins avorteurs reprend de plus belle, les femmes n'ayant pas encore le droit de disposer de leur corps.

Une période à la fois moderne et conservatrice où évoluent Jean, toujours flanqué de sa mégère et sujet aux mêmes pulsions meurtrières, François qui progresse au journal tout en s'interrogeant fortement sur sa relation avec la très secrète Nine, et Hélène bien sûr, désormais journaliste, qui couvre la disparition annoncé du village tout en se débattant face à une grossesse imprévue.

La petite Colette enfin, permet d'évoquer la maltraitance, sur laquelle chacun hésite encore à mettre des mots.

Un regard lucide sur une époque et un roman à rebondissements qui ne manquera pas de ravir les amateurs de Pierre Lemaître et sans doute bien d'autres lecteurs.

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